Un château, 15 motos et une drôle de piste

Par Steve ThorntonPublié le

Le 17 mai 1943, un escadron de bombardiers Avro Lancaster lâchait des bombes sur le barrage du réservoir d’Edersee, large de 400 m. L’eau s’est engouffrée dans la brèche vers la vallée en contrebas et une partie de l’Allemagne a aussitôt été privée d’électricité.
Confortablement assis à la terrasse du château de Waldeck, je contemple l’eau bleue du réservoir. Le barrage – réparé bien sûr – est à seulement quelques kilomètres d’ici. La serveuse apporte mon verre de merlot et j’essaie d’imaginer l’attaque de cette nuit de guerre d’il y a 69 ans.
De notre côté, nous avons mené notre propre attaque cet après-midi, sur les autoroutes allemandes. Nous étions un petit groupe d’Américains, de Britanniques et de Canadiens au guidon de motos allemandes, britanniques, italiennes, autrichiennes et japonaises, et nous avons roulé très vite.
Tous ces journalistes participaient à un événement que Continental a appelé Conti Attack Days 2012. L’objectif : essayer les nouveaux modèles de pneus de la firme. Continental est la plus petite compagnie de pneus de motos haut de gamme, mais on nous a expliqué que l’entreprise voulait s’attaquer au marché de la moto de façon beaucoup plus intensive à partir de maintenant et dans les années à venir. Dans le cadre de ce lancement, Continental avait une nouvelle technologie à nous présenter, et de nouveaux produits : les Sport Attack 2, Road Attack 2 CR et Attack SM (plus quelques modèles de course destinés uniquement au marché européen).
Plus tôt dans la journée, un jeune employé de Continental nous avait conduit au Contidrom dans une camionnette Mercedes. Il semblait croire que tous les autres véhicules sur l’autobahn avaient été placés là uniquement pour le retarder. « Stupide conducteur » s’écriait-il à chaque fois qu’il réussissait à en dépasser un, le pied au plancher, dans le flot de trafic qui roulait à 160 km/h.
Au Contidrom, il y a une grande piste ovale aux courbes inclinées et deux pistes « normales ». La plupart des participants n’avaient jamais roulé sur ce genre de piste inclinée. Chacun avait sa propre image en tête avant d’arriver, mais nous étions tous d’accord sur un point : cette piste sert à évaluer les limites des pneus et il n’est pas rare qu’on y roule à 300 km/h. Plus tard, en reparlant de leur expérience, certains ont dit: « C’est incroyable!, on peut aller aussi vite qu’on veut, impossible de se planter! » Plusieurs ont eu la piqûre et voulaient réessayer.
Une fois sur place, nous avons d’abord eu droit à une présentation des nouveaux Attack 2. Continental affirme que, par rapport à l’ancienne génération, ils offrent une meilleure traction sur surface sèche et mouillée et une meilleure durée de vie utile. Uwe Reichelt, le directeur de la division moto, nous a expliqué que Continental est à la recherche de nouveaux débouchés en Asie et en Amérique du Sud et que « curieusement, c’est Continental qui a la licence de fabrication pour les pneus Dunlop en Malaisie, au Brunéi et à Singapour (ils y fabriquent le vénérable TT100). Tous les pneus radiaux à haute technologie, par contre, sont fabriqués en Allemagne, a précisé Reichelt.
Puis c’est Andreas Faulstich qui a pris le relais. « Nous essayons de fabriquer des pneus en fonction de l’usage réel qu’en font les motocyclistes, a-t-il dit. Par exemple, pour un modèle comme le Sport Attack 2, on ne cherche pas à avoir la traction maximale, les meilleurs temps sur piste ou les vitesses les plus élevées sur surfaces mouillées. Car ce qui compte vraiment dans ce cas, c’est d’obtenir une conduite agréable et sécuritaire sur la route en conduite sportive, et d’améliorer ses performances de conducteur. Voilà la concept de base de nos produits Attack. »
Le Sport Attack 2 est le premier pneu que nous avons examiné dans le cadre de ce lancement. On le retrouve en équipement d’origine sur les BMW S1000RR 2012. C’est un pneu à ceinture d’acier enrobé d’un composé surnommé « chili noir » a poursuivi Faulstich; il permet d’obtenir une meilleure traction tout en offrant assez de rigidité pour rouler à hautes vitesses sans se déformer selon la firme. Lors de la fabrication, on utilise des températures différentes dans différentes sections du moule : plus chaude au centre pour accentuer la vulcanisation et la fermeté, moins élevée sur les côtés pour assurer la souplesse des flancs. Les autres manufacturiers utilisent deux différents composés pour atteindre ce résultat; le procédé de Continental permet de faire appel à un composé unique. 
Faulstich a aussi expliqué que lorsqu’on sort ces pneus de leur moule, leur surface est déjà rugueuse (pas besoin d’agent de démoulage); la période de rodage sur route est donc plus courte.
On nous a aussi présenté les Road Attack 2 CR (pour Classic Race). Avec cette série, Continental veut offrir aux pilotes de motos plus âgées des pneus de course de qualité comparable aux pneus de course modernes de 17 po.
« Allez vous choisir une moto » nous a-t-on dit ensuite. Il y en avait 15, la plupart chaussées de Sport Attack 2. J’ai choisi une BMW K1300R et nous avons commencé les essais sur l’asphalte sec, sur une piste sans dénivellation d’environ 4 km. J’ai essayé de tester les limites des pneus autant que je pouvais, mais je me suis fait dépasser à plusieurs reprises par des journalistes plus expérimentés sur circuit. Après quelques tours, j’ai remplacé ma BMW par une Kawasaki Z1000. Comme nous l’avaient promis les gens de Continental, les Sport Attack 2 réagissent de façon neutre et prévisible et ils collent bien. J’ai aussi essayé une Kawasaki ER-6N, une Triumph Street Triple 1050 et une Ducati 848 Streetfighter. Dans tous les cas, les pneus se sont bien comportés et mes manoeuvres en piste n’ont jamais engendré de réactions désagréables des pneumatiques. L’adhérence est solide, les pneus donnent un bon feedback, et la conduite est légère.
Nous avons aussi roulé sur l’asphalte mouillé. Sur ce circuit de 1,9 km, le revêtement était détrempé d’un bout à l’autre grâce au système d’arrosage qui entoure le tracé. J’ai roulé plus prudemment que sur le sec, bien sûr, mais quand même plus vite que je ne l’aurais fait sur des routes publiques. Je n’ai jamais senti de perte de traction. À un moment donné, j’ai aperçu dans mon rétroviseur un pilote qui chutait. Je lui ai demandé plus tard ce qui s’était passé. Il ne pouvait l’expliquer : tout à coup, il s’est retrouvé au sol.
C’est entre les essais sur circuit sec et mouillé que la plupart des journalistes ont vécu leur moment le plus marquant. Car on nous a emmené à l’ovale incliné.
À première vue, cet ovale semble plus étrange qu’impressionnant : on dirait un ruban qu’on aurait surchauffé et qui aurait tordu aux deux extrémités. Il s’agit en fait de ceux grands droits parallèles qui se terminent par deux virages inclinés (très inclinés). On peut atteindre des vitesses élevées sur le droit puis, quand on arrive au virage, la moto monte, poussée par la force centrifuge. Je suis arrivé dans la section inclinée à 200 km/h, bien recroquevillé sur ma K1300. À cette vitesse, je suis monté à mi-hauteur de la courbe, ce qui correspond à environ 2 ou 3 mètres d’élévation verticale, puis je me suis mis à redescendre. J’étais loin d’aller assez vite pour monter jusqu’en haut de la courbe.
Quelque chose de très étrange se produit quand on roule sur cet ovale. À mesure que ma BMW entrait dans la courbe, la moto s’inclinait de plus en plus, mais pas par rapport à la route sous mes pieds. Autrement dit, la moto est penchée, mais elle demeure presque perpendiculaire à la route… Ce qui fait qu’en relevant la tête pour regarder un peu plus loin devant moi, j’ai vu le sol qui montait, comme si j’allais faire une boucle verticale digne des cascadeurs les plus fous. Physiquement, je ne percevais pas d’indices qui m’indiquaient que je montais une pente, mais visuellement, oui. Sensation extrêmement bizarre. Après trois ou quatre tours, j’en ai eu assez…
En fin de journée, nous avons repris la route vers Waldeck, son château qui domine la campagne environnante et le magnifique réservoir d’Edersee. Vu d’une certaine distance, on dirait un château de conte de fées. Sur les autoroutes allemandes qui nous y ramenaient, j’ai parfois roulé plus vite que sur l’ovale, et les Conti se sont comportés admirablement bien. Quelques-uns d’entre nous ont même réussi à se perdre mais un journaliste britannique avec des notions d’allemand a réussi à nous remettre sur le chemin de Waldeck. Et me voilà à la terrasse avec un verre de vin. Je pense à cette nuit de 1943 et je me trouve bien petit et bien peu important.

Les nouveaux Sport Attack 2 sont offerts dans les formats populaires pour roues de 17 po; prix de 175 à 270 $ CAN. Les Attack SM supermotard coûtent de 150 à 215 $. Le prix des CR n’a pas encore été annoncé.

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