Buell 1125R, c’est mieux au liquide

Par Costa MouzourisPublié le

Les cochons ne volent pas et l’enfer n’est pas encore gelé, mais la dernière Buell a un moteur refroidi au liquide.

Buell Motorcycles célèbre son 25ème anniversaire en 2008 (la 100 000ème Buell est sortie des lignes de montage en novembre dernier), et quel meilleur moyen de célébrer cette occasion que de sortir un tout nouveau modèle. La 1125R n’est pas une nouvelle moto au sens habituel de Buell, qui consiste à modifier une plateforme existante, lui greffer de nouvelles pièces en provenant d’autres motos, lui installer une fourche d’un modèle et le bras oscillant d’un autre modèle. Celle-ci est un nouveau modèle de A à Z.

J’ai eu l’occasion de piloter la nouvelle Buell durant le lancement mondial à la mi août en Californie. Durant le lancement de deux jours, nous pilotons la 1125R sur une boucle de 300 kms qui serpente dans les montagnes au sud est de Monterey et le long de la US Highway 1 puis sur le circuit de Laguna Seca Raceway.

Le bicylindre en V à 45 degrés refroidi par air utilisé sur les Buell jusqu’à maintenant est une version dérivée très évoluée du moteur de la Harley Sportster, qui lui-même provient d’un moteur à deux soupapes par cylindre avec culbuteurs qui date de 1957. Ce moteur de 50 ans culmine maintenant à 1339 cm3 et fournit 150 chevaux dans la moto de production XB-RR pilotée par Steve Crevier dans la série AMA Formula Xtreme l’an dernier.

Le nouveau bi cylindre en V Helicon de 1125 cm3 à 72 degrés de 103 mm x 67,5 mm est exclusif à Buell, et son design est un effort collectif  de Buell et de BPR-Rotax, la production étant assurée par BPR-Rotax.  Le fabricant autrichien a beaucoup d’expérience dans la fabrication de moteurs de motos, son portfolio incluant les monocylindres de 652 cm3 refroidis au liquide utilisés par BMW et les bicylindres en V à 60 degrés de 998 cm3 utilisés sur divers modèles Aprilia ainsi que sur le nouveau BRP Spyder. Les culasses sont à double arbre à cames, avec l’arbre d’admission entraîné par chaîne, l’arbre d’échappement étant entraîné par engrenages à partir de l’arbre d’admission. L’activation des soupapes se fait par finger-follower, et l’ajustement des soupapes se fait tous les 20 000 kms au moyen de cales.  Le taux de compression est de 12,3 :1 et le système d’injection d’essence à boucle fermée utilise d’énormes corps d’admission de 61 mm. Ce dernier moteur produit une puissance annoncée de 146 ch. à 9800 trs/mn dans sa forme originale, avec un ram air qui ajoute 5 ch. en mouvement. À 10500 trs/mn, la zone rouge est 3700 trs/mn plus haute que sur le moteur XB refroidi par air, et les caractéristiques de puissance du Helicon vous permettent de le pousser jusqu’à ce régime. Les bandes de puissance des deux moteurs sont presque identiques jusqu’à ce que la coupure d’allumage entre en fonction sur l’ancien moteur tandis que le nouveau moteur continue de tirer fort encore un bon moment. Le couple maxi de 82 lb-ft est atteint à 8000 trs/mn. C’est deux lb-ft de moins que sur le moteur refroidi par air, à un régime plus élevé de 2000 trs/mn, cependant l’avantage du nouveau moteur est évident : il produit 43 ch. de plus que le moteur précédent. Ceci devrait faire taire les critiques qui haïssent le moteur antique refroidi par air mais apprécient le design innovant des châssis Buell.

J’avais hâte de piloter la nouvelle Buell; j’ai coursé sur une Firebolt dans la série Canadian Thunder avant qu’elle ne soit intégrée dans le championnat du Parts Canada Superbike, et je suis familier avec la géométrie radicale des Buell. La 1125R conserve un angle de chasse abrupt de 21 degrés et un déport de 84 mm, mais elle gagne 66 mm en empattement pour atteindre 1387 mm. Malgré la complexité additionnelle du système de refroidissement par air, la 1125R pèse 9 kgs de moins que la XB refroidie par air, à 170 kgs à sec. Comme dans le cas des séries Buell XB, la 1125 transporte son essence dans le châssis (avec une capacité augmentée à 21,2 litres au lieu de 14,4), mais l’huile moteur se trouve maintenant dans un réservoir en aluminium qui est intégré dans le moteur à carter sec, au lieu d’être dans le bras oscillant, et le  moteur à contre balancier est maintenant fixé au châssis de manière rigide, au lieu des fixations sur caoutchouc dans le cas des modèles XB. Cette dernière modification augmente la rigidité du châssis et réduit les besoins de maintenance car il n’y a plus de fixations en caoutchouc qui s’usent et nécessitent un remplacement. L’inconvénient de la fixation rigide est qu’elle augmente le niveau des vibrations. Sur la route, les vibrations sont à un niveau tolérables, mais à Laguna Seca, le moteur est souvent poussé à plus de 8000 trs/mn et les vibrations s’emparent des repose pieds et du guidon. L’une des motos que j’ai pilotées avait un buzz très accentué dans le repose pied droit.

Il y a beaucoup de couple disponible dès 2500 trs/mn, ce qui facilite beaucoup les sorties de virage sur circuit et rend optionnels les changements de rapport sur les routes sinueuses. Les six rapports se changent avec douceur et précision, une grosse amélioration par rapport à la transmission à cinq rapports des modèles XB. Les ratios sont proches, bien que la transmission en général soit longue, ce qui donne une première vitesse très longue. L’injection d’essence réagit bien, bien que certains journalistes se soient plaints d’un plat autour de 4000 trs/mn. Nous pilotons des prototypes de pré production et Buell nous informe que des modifications seront apportées sur les modèles de série.

Une position de pilotage de type moto sport mais pas extrême place le pilote plus droit et offre plus d’espace aux jambes que sur la plus part des machines super sport, tout en offrant la possibilité de se baisser pour le pilotage sur circuit. Le refroidissement se fait par deux radiateurs latéraux, mais le moteur monte en température durant l’essai sur route, se situant souvent dans un intervalle de 195 à 225 degrés Fahrenheit. Les ventilateurs se mettent alors souvent en marche à cette température (la température ambiante était de 106 degrés Fahrenheit maxi) et font pas mal de bruit, mais ils restent moins bruyants que le simple ventilateur utilisé pour expulsé l’air chaud à l’arrière du moteur sur les modèles XB. Des tuyaux situés dans le châssis évacuent l’air chaud vers l’arrière de la moto et cela fonctionne bien. Je ressens seulement une chaleur inconfortable sur le pied droit à des vitesses moindres qui proviennent probablement du collecteur d’échappement. Le design du carénage est emprunté de la XB-RR, et le carénage est inhabituellement large, ce qui ne parait pas nécessairement sur les photos de la moto. Il fournit plus de protection au vent que le carénage d’une moto supersport, sans créer de turbulences.

La suspension Showa est faite d’une grosse fourche inversée de 47 mm ajustable en pré contrainte, compression et rebond, tout comme l’amortisseur arrière. Les réglages de la suspension sont un peu fermes pour une utilisation normale sur route, mais Buell nous indique que les motos de production auront des réglages un peu plus souples. La 1125R tourne avec très peu d’effort à basse vitesse, mais l’effort devient beaucoup plus grand lorsque la vitesse augmente, ce qui est aussi un trait curieux caractéristique de la Firebolt et inattendu sur une moto qui a une géométrie de direction aussi incisive. La transmission finale par courroie limite les changements de rapport pour une conduite sur route, mais les coureurs vont certainement la remplacer par une transmission par chaîne.  La stabilité à haute vitesse inspire confiance grâce à l’amortisseur de direction, bien que j’aie eu un léger louvoiement lorsque je ne tenais pas le guidon assez fermement sur l’un des raccords du circuit Laguna Seca dont le bitume a été refait récemment. Sur route, la 1125R avale les bosses en virage sans quitter sa trajectoire. Les Pirelli Diablo Corsa III d’origine offrent une excellente adhérence tant sur route que sur circuit, le pneu arrière offrant un composé avec deux types de gommes.

L’effort à l’embrayage est modéré avec le moteur en marche, et un peu plus élevé avec le moteur arrêté. L’embrayage bénéficie d’un système d’assistance breveté par BPR qui est conçu pour simuler un embrayage à glissement limité. Avec un haut régime moteur pendant les rétrogradages, l’assistance du moteur agit contre la pression des ressorts d’embrayage, ce qui permet à ce dernier de glisser comme un embrayage à glissement limité.  L’embrayage peut ainsi être utilisé en entrée de virage sans bloquer la roue arrière. Pas aussi efficace qu’un véritable embrayage à glissement limité, mais il permet de freiner fort en virage sans se soucier d’être doux avec l’embrayage.

Une caractéristique de Buell est le positionnement de l’échappement sous le moteur, ce que les manufacturiers japonais commencent aussi à faire récemment. Ce modèle n’offre pas de convertisseur catalytique (contrairement aux 1125R destinées au marché européen), mais le grand volume du silencieux permet un bon écoulement des gaz tout en réduisant le bruit excessif. Je trouve le son peu inspirant et fade, un petit inconvénient pour la protection de l’environnement et pour rester en paix avec ses voisins.

La centralisation des masses est toujours à l’agenda chez Buell, et un simple et grand disque de frein inversé est utilisé à l’avant. La puissance de freinage est supérieure à celle des modèles XB en raison de l’adaptation d’un étrier à huit pistons (six sur les XB) utilisé pour la première fois sur la XB-RR de course. Ce système est censé permette un gain de poids de 2,5 kg par rapport au système conventionnel à deux disques d’une GSX-R1000, tout en permettant de réduire le poids non suspendu. Le mordant initial n’est pas aussi fort que sur le système à deux disques, mais la puissance et la résistance au fading sont comparables.

Les modifications majeures se déroulent lentement chez Buell, tout comme chez sa compagnie mère Harley. L’une d’entre elles s’est produite en 2003 lorsque les anciens châssis tubulaires en acier furent remplacés par le châssis XB en aluminium. La compagnie entre maintenant dans une nouvelle ère avec un moteur refroidi au liquide.  La 1125R est sans aucun doute la première machine d’une nouvelle série qui va remplacer tous les modèles refroidis par air d’ici quelques années. À $13599, la 1125R coûte $2320 de plus que la XB12R, mais elle est à $6400 de moins que la Ducati 1098 et à $5400 de moins que la Aprilia RSV1000. Ses performances étant maintenant à un niveau comparable à ces machines bicylindres exotiques, cette moto sport américaine va certainement faire tourner des têtes. Buell ne pouvait probablement pas souhaiter un meilleur cadeau d’anniversaire

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