Archives – Lancement des BMW R18B et R18 Transcontinental 2022 – Les R18 aux longues jambes

Par Bertrand Gahel. Photos : Kevin Wing. Publié le

*Archives – Cet article est tiré du Vol. 50 No. 8 de Moto Journal.

Aux amateurs de customs rêvant de rouler tranquillement jusqu’au Grand Canyon, au lac Louise ou au Blue Ridge, BMW offre ces nouvelles R18B et R18 Transcontinental 2022. Quant à nous, c’est au Colorado que nous avons pris contact avec elles.

Denver, Colorado.

Compte tenu des baisses de ventes bien documentées chez Harley-Davidson et vu le quasi-abandon de la classe custom par plusieurs des constructeurs qui en offraient, il est tout à fait justifié de s’interroger sur l’avenir de ce type de motos. À cette question existentielle, BMW répond de façon surprenante en sautant avec enthousiasme sur un bateau que beaucoup d’autres quittent aujourd’hui. Cette volonté de revenir dans le monde custom a été soulignée par le lancement de la R18 il y a un an et la marque allemande réaffirme sa position en 2022 en présentant cette paire de montures de tourisme construites sur la même base, mais adaptées aux voyages.

Durant la période de questions de la présentation nord-américaine des nouvelles R18B (26 945 $) et R18 Transcontinental (29 500 $) 2022, à Denver, je n’ai pu m’empêcher de demander au constructeur d’expliquer pourquoi, vu les difficultés auxquelles fait face la classe custom, il a choisi d’y faire un retour maintenant et avec ces modèles. La réponse se résume à ceci : pour BMW, un succès équivaudrait à rafler à peine quelques points de pourcentage des ventes actuelles de Harley-Davidson dans ce créneau. Les R18B et Transcontinental n’ont donc pas du tout comme but de séduire tous les amateurs de Harley-Davidson Street Glide et d’Indian Roadmaster. Juste une toute petite partie. Elles ont également la mission de garder, dans la mesure du possible, les clients de BMW chez BMW dans le cas où l’envie leur prendrait de rouler à l’américaine.

Il s’agit d’un rôle qu’il est important de bien saisir, puisqu’il explique tant le côté relativement peu innovateur des nouveautés que leur apparence très conservatrice. Dans d’autres cas, de tels constats seraient considérés comme négatifs. Mais dans celui-ci, comme la volonté du constructeur se limite à joindre un créneau sans faire de remous pour venir y voler quelques ventes aux marques rivales, l’air familier des R18B/T devient logique et on comprend mieux pourquoi, à l’exception de leur immense Big Boxer de 1802 cm3, les nouveautés donnent une impression de déjà vu laissant croire qu’elles ont été inspirées par les baggers et les customs de tourisme des marques concurrentes. En effet, tant le carénage que les valises ou même les proportions générales rappellent quelque chose à propos des modèles similaires rivaux. Il semble donc assez clair que BMW se soit volontairement contenté de reprendre la formule acceptée et adoptée par l’amateur moyen de ce type de motos.

Le conservatisme des deux nouveautés ne les empêche pas d’offrir certaines caractéristiques propres à elles, voire uniques. La plus importante est évidemment cette fascinante sculpture mécanique qu’est leur gigantesque bicylindre Boxer refroidi par air et huile. Selon BMW, il s’agit exactement du même moteur de 91 chevaux que celui de la R18 de base, sans différences en ce qui concerne la boîte à six vitesses ou la démultiplication finale. Immédiatement, les caractéristiques mécaniques très particulières de la R18 custom sont reconnues sur les R18B/T, notamment le son grave et feutré des silencieux, l’accélération «toute en couple» et les pulsations lourdes du Big Boxer, sans oublier la façon marquée dont celui-ci fait tanguer la moto à gauche après un coup d’accélérateur, au neutre. On constate toutefois que l’intensité de ces sensations semble légèrement effacée sur les R18B/T par rapport à la R18 originale. Le phénomène est probablement attribuable à la construction des nouveautés, puisque la sonorité des silencieux arrive moins directement aux oreilles du pilote à cause des valises latérales (absentes sur la R18) et que la masse nettement plus élevée des R18B et Transcontinental absorbe une certaine quantité des pulsations du bicylindre.

D’ailleurs, s’il est une caractéristique des R18B/T qui frappe dès les premiers moments en selle — et qu’on n’oublie jamais par la suite —, c’est leur poids extraordinairement élevé. On parle de 397 kg pour la B et de 426 kg pour la Transcontinental, cette dernière s’approchant donc tout près des 1000 lb. En matière de motos de production, elles font partie de ce qui existe de plus lourd, ce que j’ai constaté de manière surprenante juste avant de prendre la route. Après avoir pris place sur la Transcontinental et l’avoir fait démarrer, je l’ai relevée de sa béquille. Je m’attendais à ce qu’un effort considérable soit requis pour la relever, mais j’ai été surpris de la sentir passer la verticale et commencer à pencher de l’autre côté, ce qui a nécessité un second effort pour la ramener droite. Durant chaque moment passé à manœuvrer les nouveautés à basse vitesse durant tout le reste de l’essai, ce petit épisode ne m’a jamais quitté l’esprit et me rappelait que leur immense masse exigeait d’être précis et concentré. S’il est vrai que tous les mastodontes de cette catégorie demandent le même genre d’attention, la Transcontinental tout particulièrement ne donne pas sa place à ce chapitre et requiert de son pilote qu’il possède l’expérience et la force physique adéquates, et ce, d’autant plus si les valises sont remplies et qu’un passager prend place à l’arrière.

Sans le poids logé en hauteur de la valise centrale de la Transcontinental, la R18B s’avère moins intimidante durant les manœuvres à basse vitesse, mais elle reste imposante et exige quand même de son pilote un bon niveau d’expérience.

La masse élevée des deux versions a également comme conséquence d’affecter les performances de manière notable. D’amusantes sur la R18, elles sont réduites à moyennes sur la R18B et deviennent faibles sur la R18 Transcontinental. Il ne s’agit absolument pas de motos prétendant être rapides et ces prestations timides ne représentent donc pas un point particulièrement décevant, d’autant plus que l’expérience de pilotage se trouve considérablement enrichie par le caractère charmant du gros Boxer. Mais les intéressés ne doivent certainement pas s’attendre à des accélérations foudroyantes.

On attend évidemment de montures comme les R18B et R18 Transcontinental un grand niveau de confort sur long trajet. Or, elles sont basées sur la R18 custom dont l’ergonomie a largement été critiquée en raison de la courte distance qui sépare la selle très basse et les repose-pieds dont la position centrale est dictée par les gros cylindres. Heureusement, cette critique ne s’applique pas aux R18B/T. Bien que leurs repose-pieds soient fixés au même endroit, les selles nettement plus hautes ouvrent l’angle des jambes et éliminent la sensation d’être coincé communément ressentie sur la R18. De plus, comme la raison pour laquelle les selles des R18/T sont plus hautes est une augmentation considérable du rembourrage, leur niveau de confort s’en trouve agréablement accru. Parce qu’elle est plus épaisse et plus haute que celle de la R18B, la selle de la R18 Transcontinental est décidément le meilleur choix lorsqu’il est question d’accumuler des kilomètres en grande quantité, d’autant plus qu’elle améliore la position de conduite en la rendant encore plus dégagée. Les avantages de la Transcontinental en voyage ne s’arrêtent pas là, puisqu’elle est équipée d’un pare-brise plus haut offrant une meilleure protection contre les éléments. On peut néanmoins reprocher à ce dernier d’arriver juste dans le champ de vision de la majorité des pilotes. On s’y fait, mais dans le cas contraire, une solution simple pourrait être d’installer le pare-brise plus court, mais quand même efficace de la R18B, puisqu’ils sont interchangeables. Notons que la selle plus haute et plus confortable de la Transcontinental ainsi que son pare-brise haut peuvent tout aussi bien être installés sur la R18B, ce qui permet de faire de cette dernière une bagger plus apte aux longues distances.

Bien que la controverse ergonomique de la R18 custom ait disparu sur les R18B/T grâce à leur position de conduite plus détendue et dégagée, une caractéristique des nouveautés a quand même immédiatement irrité tous les journalistes sur le plan de l’ergonomie, moi inclus. En effet, atteindre l’avant du sélecteur de vitesses de type «heel and toe» avec le pied gauche s’est avéré étrangement difficile et exigeait, entre autres, de tourner le pied vers l’intérieur. En m’agenouillant pour regarder sous le cylindre pourquoi changer de vitesse était si compliqué et agaçant, j’ai constaté que le levier pouvait être ajusté. Il aurait d’ailleurs dû l’être avant que les journalistes commencent leur essai. J’ai demandé que des ajustements soient faits durant la pause du lunch, ce qui a été facilement réalisé et a réglé le problème. Comme la plupart des autres essayeurs ont continué de rouler la moto telle quelle, il ne serait pas étonnant de voir la critique apparaître çà et là. Mais il reste qu’un simple réglage suffit pour régler le cas.

BMW a clairement établi qu’il n’entendait pas réinventer la roue en matière de baggers et de customs de tourisme avec ses R18B et R18 Transcontinental, et il est tout aussi clair qu’il ne l’a pas fait, puisque le seul aspect unique des nouveautés se veut finalement le charmant Big Boxer qui les anime. Pour le reste, à défaut d’être exceptionnelles, elles s’avèrent quand même tout à fait compétentes. Leur comportement est solide et précis, leur direction est légère une fois en mouvement, leurs suspensions fonctionnent bien et leur freinage combiné est puissant et facile à moduler. Leur prix n’est pas déraisonnable (attention aux options qui peuvent le gonfler) et leur liste d’équipements est longue — elle comprend, entre autres, un système audio de bonne qualité conçu en collaboration avec Marshall et un régulateur de vitesse adaptatif avec radar.

Mais l’aspect le plus important des nouveautés, c’est qu’une fois toutes ces caractéristiques combinées, la R18B et surtout la R18 Transcontinental arrivent à proposer une version parfaitement légitime du voyage à moto à l’américaine. Elles s’adressent aux motocyclistes souhaitant traverser confortablement et sans se presser de longues distances en admirant les paysages défiler au rythme des lourdes pulsations d’un gros bicylindre. À ces amateurs de baggers et de grosses customs de tourisme, même si elles ne proposent pas le produit le plus innovateur ou traditionnel du marché, elles représentent décidément des options qui méritent d’être considérées.

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