MV Agusta Turismo Veloce: Nouvelle direction

Par James NixonPublié le

La première MV qui ne cherche pas à casser la baraque…
« C’est la première fois que nous créons une moto sans nous inspirer de nos victoires en compétition ou de nos pilotes légendaires, et sans essayer de battre des records de vitesse ou de puissance », lance Giovanni Castiglioni, le directeur général de MV Agusta. « Nous sommes des passionnés de course, et la création d’une MV de tourisme a été un grand défi pour nous. » Un défi qui a demandé beaucoup de temps. 

La Turismo Veloce a été dévoilée pour la première fois au Salon de la moto de Milan en 2013. Le long délai entre ce dévoilement et les modèles de production s’explique par le fait que MV a changé d’approche en cours de route. « Habituellement, quand nous concevons un nouveau modèle, nos premières préoccupations sont toujours centrées autour de la puissance et des performances, explique Brian Gillen, le responsable de la création des moteurs à trois et quatre cylindres de la firme. La première version de la Turismo Veloce développait plus de 125 ch. Mais nous avons réalisé par la suite que pour ce modèle, notre objectif devait être de créer une moto aussi conviviale que possible ».

La Turismo Veloce est propulsée par le fidèle tricylindre de 798 cc de MV, mais en version recalibrée pour le tourisme avec de nouveaux pistons, de nouveaux arbres à cames et des chambres de combustion redessinées. De plus, les rapports de transmission ont été allongés de façon à réduire le régime d’environ 2000 tr/min aux vitesses de croisière. Ce moteur a perdu une quinzaine de chevaux (il produit 110 ch au vilebrequin selon la firme) mais, comme le souligne Gillen, il a surtout vu son couple bondir de 18 % à bas et moyens régimes. Il s’élève maintenant à 61,2 lb-pi à 8000 tr/min selon MV, et 90 % du couple maximal est disponible entre 3500 et 10 300 tr/min. En rendant le moulin plus souple, on a également réduit les vibrations et abaissé sa consommation d’essence de 20 %.

Côté cycle, le cadre en treillis, le sous-cadre léger et élégant, le bras oscillant et les roues ont été « dessinés à partir de zéro », explique Adrian Morton, le designer en chef chez MV. « La Turismo Veloce est loin d’être un modèle existant que nous avons simplement modifié pour le tourisme, reprend Gillen. Au contraire, seulement environ 6 % des pièces existaient déjà, soit pour l’essentiel, le vilebrequin, les carters moteur, les étriers de frein avant et la couronne arrière. Tout le reste a été conçu et réalisé pour exprimer notre vision d’une moto de tourisme sportif. »

Voilà pour la théorie. Pour nous permettre de découvrir comment tout cela se traduit en pratique, MV avait choisi la Riviera française pour ce lancement. En démarrant le tricylindre devant le Grand-Hôtel du Cap-Ferrat, je remarque d’emblée qu’il émet une musique plus feutrée que celle de ses homologues au tempérament plus sportif, mais il conserve la tonalité rauque typique des MV.

La Turismo Veloce est dotée de nouvelles commandes au guidon. À droite, le bouton démarrage/arrêt d’urgence sert également à sélectionner les cartographies moteur : Sport, Tourisme, Pluie, Personnalisée). On y trouve également les boutons de contrôle de l’ABS et du régulateur de vitesse (qui fonctionne uniquement en sixième vitesse, à plus de 50 km/h). Le bloc de gauche regroupe le klaxon, les clignotants, l’interrupteur à bascule pour naviguer dans les menus et l’interrupteur croisement/route pour le phare à DEL. Le tableau de bord est affiché dans un écran couleur TFT de 5 pouces. On y retrouve beaucoup d’informations et la présentation est un peu surchargée; toutefois, la vitesse, le régime moteur et le rapport sélectionné ressortent clairement. La moto est livrée avec connectivité Bluetooth et on peut y relier jusqu’à neuf appareils. Par contre, en voulant nous faire une démonstration, le représentant de MV a été incapable de quitter l’écran « appel entrant » et il a dû couper le contact et le remettre pour contourner le problème. De même, le passage d’une cartographie moteur à l’autre était erratique. Pour alimenter tous vos gadgets électroniques, il y a deux sorties 12 V et deux prises USB.

Après avoir sélectionné la cartographie Sport, je relâche l’embrayage à commande hydraulique (une première pour MV), et il devient vite évident que la Turismo Veloce a gardé l’âme sportive d’une MV. L’accélération est vive et puissante, et on se sent que la roue avant s’allège dès qu’on tord la poignée. La machine est livrée de série avec l’antipatinage et un système quickshift qui permet de monter et de descendre les rapports sans utiliser l’embrayage. Pour ralentir la bête, MV a fait appel à des étriers Brembo à quatre pistons à montage radial à l’avant, avec disques de 320 mm; leur action est à la fois souple et puissante. Les freins sont dotés d’un système ABS avec dispositif de réduction du soulèvement de la roue arrière. En mode Pluie, la réponse du moteur devient plus douce (et la puissance est limitée à 80 ch) et l’ABS intervient plus tôt et de façon plus insistante.

Avec son poids à sec affiché de 191 kg, la Turismo Veloce est très légère. Comme elle est également compacte, mais dotée d’un guidon relativement large, elle se laisse mener avec entrain dans les petites routes sinueuses de Tourette-Levens. Au début, je trouvais la suspension un peu trop molle et la moto avait tendance à osciller dans les virages. En augmentant la précharge du ressort de l’amortisseur Sachs, les choses se sont améliorées, mais le problème n’a pas complètement disparu. Lors de notre pause du midi, un technicien a augmenté l’amortissement en détente avec un tournevis (non inclus dans la trousse d’outils minimaliste sous la selle). Il a également raffermi l’amortissement (en compression et en détente) de la fourche Marzocchi. Résultat : une nette amélioration et une tenue de route impeccable dans les virages particulièrement serrés de la descente.

Après avoir validé que la Turismo Veloce se comporte très bien en tant que sportive, je sélectionne le mode Tourisme (qui abaisse la puissance maximale à 90 ch) et j’adopte une conduite plus détendue. Facile, car avec son poste de pilotage spacieux, sa position de conduite naturelle, avec le torse relevé et les jambes légèrement fléchies, on se sent tout de suite à l’aise. La selle est plutôt ferme, mais elle est demeurée confortable pendant les quelque 200 km de notre randonnée. Toutefois, sa hauteur (850 mm) pourrait s’avérer problématique pour les pilotes plus petits. Le pare-brise à trois positions est facile à ajuster d’une seule main. Sur nos modèles d’essai, par contre, il fallait contourner l’écran de navigation GPS offert en option (prix à déterminer). Dans sa position la plus basse, le pare-brise dirigeait l’air sur ma poitrine; en position haute, l’air circulait à la hauteur de mon front. Les turbulences sont minimes.

Sur certains modèles MV que nous avons essayés auparavant, le moteur avait tendance à toussoter et à sautiller quand l’accélérateur n’était que légèrement ouvert. Avec la Turismo Veloce, on sent encore une légère hésitation en pareil cas, comme si le moteur était choqué qu’on veuille le solliciter de manière si timide, mais rien de dérangeant. À 80 km/h en sixième vitesse, le moulin tourne en douceur à tout juste un peu plus de 3000 tr/m. Cela dit, c’est quand on exploite sa bande de puissance à moyens régimes, particulièrement large et flexible, que ce moteur brille le plus. En troisième et quatrième vitesse, sur le ruban lisse de la Riviera, la Turismo Veloce répond avec souplesse aux commandes changeantes de l’accélérateur. Ce modèle est certainement le plus civilisé de la gamme MV.  

Parlons des valises puisqu’il s’agit d’un élément essentiel de toute machine sérieusement destinée au tourisme, et aussi parce que MV leur a accordé une importance particulière (voir l’encadré). À chaque fois que nous faisions une pause, je m’affairais à les ouvrir et à les fermer à répétition, ce qui a fait croire à certains collègues que je souffrais d’un TOC (trouble obsessionnel compulsif)… Mais cela m’a permis de constater qu’elles fonctionnent très bien (même s’il faut deux mains pour les utiliser). De plus, malgré leur forme inhabituelle (mais élégante), leur volume est très raisonnable et on peut y ranger un casque intégral extra grand. Par contre, chaque valise est accrochée par seulement deux points de fixation; j’aurais peur de les charger trop lourdement.

Les valises sont offertes en option (prix à déterminer) sur les modèles de base que nous avons essayés. Avec le modèle Lusso (luxe en italien) qui sera prêt seulement en juin, on obtiendra une suspension Sachs semi-active, des poignées chauffantes, une béquille centrale et un système de navigation GPS intégré. La Lusso sera peut-être également livrée avec les valises, mais la décision finale n’a pas encore été prise à ce sujet selon Tim Massarelli de MV Canada. Le prix du modèle de base devrait être de 18 995 $, et de 22 995 $ pour la Lusso. Les deux devraient être disponibles au pays au milieu ou à la fin de l’été, ou au plus tard au début de l’automne.

Le patron Castiglioni dit que la Turismo Veloce est une moto extrêmement agréable à piloter parce qu’on peut rouler sportif quand on en a envie, et partir en voyage si le cœur nous en dit. Nous sommes prêts à vérifier cela avec plaisir dans le cadre d’un essai à plus long terme.

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