L’Amérique en sport bike

Par Marc ParadisPublié le

Voici la première partie du voyage fait à moto durant l’été 2010. À la suite d’un voyage fait en 2008, de Tofino CB vers Montréal, moi et mon cousin Francis avons eu la piqure pour les longs périples à moto. Plus particulièrement en moto sport. Ainsi, lors de ce premier trajet, nous avons sillonné les plus belles routes du Canada. L’année suivante, en 2009, nous devions terminer ce que nous avions commencé, c’est-à-dire la traversée du Canada. Cette année-là, nous sommes allés jusqu’à Terre-Neuve en passant par la Cabot Trail à quelques reprises. Puisque le goût d’aventure en moto sport ne cessait de s’accroître, il a été tout naturel de se fixer l’ultime défi. Traverser l’Amérique!

Printemps 2010, il est convenu que l’itinéraire sera de parcourir la côte ouest d’Anchorage, en Alaska, jusqu’à San Diego puis de revenir à Montréal avec une CBR600RR et un ZX10. La durée prévue est de 21 jours; soit une moyenne de 600 km par jour. Le départ est planifié pour le 16 juillet. Entre-temps, pour nous endurcir, nous parcourons le Québec pour quelques trackdays. Les motos sont envoyées par camion, deux semaines avant notre départ. Elles parcourront environ 7 000 km.

16 juillet, jour J. Après une courte et fébrile nuit, Francis se lève du lit paniqué. Il me dit qu’il a oublié sa clé de moto chez lui à Saint-Sébastien de Frontenac, situé à 300 km de Montréal. Moment de tension, il faut réfléchir rapidement puisque notre départ se fera en début d’après-midi. Après réflexion, on appelle la famille là-bas et il est convenu de se rencontrer à mi-chemin pour récupérer la fameuse clé. Par chance, nous avons réussi à régler cet inconvénient juste avant le départ.

Le vol de Montréal jusqu’à Anchorage dure neuf heures. Nous atterrissons à 21 h, heure locale, sous un splendide soleil et une température de 16°C. Cela dépasse toutes nos attentes. Une fois à l’hôtel, nous décidons d’explorer la ville d’Anchorage et de prendre une bière. Quel ne fut pas notre étonnement de trouver la bière québécoise « La fin du monde » dans un pub de la place! Le nom de la bière est plutôt approprié, il est clair qu’on ne peut aller plus loin sinon la Chine! Nous avons profité de ce moment pour discuter avec les gens du coin. Ils sont particulièrement sympathiques. Ils nous suggérèrent quelques parcours à ne pas manquer en Alaska, notamment deux petites villes portuaires nommées Homer et Whittier. Après ces judicieux conseils, nous décidons de rentrer. Le soleil vient de disparaître, il est 12 h 30 am! Les nuits sont courtes car nous sommes près du cercle polaire.

17 juillet. L’aventure débute. C’est le branle-bas de combat afin de trouver notre colis envoyé deux semaines plus tôt. Une fois sur place, je m’empresse de signer les papiers pendant que Francis récupère le colis et commence à le « déballer ». Le sourire jusqu’aux oreilles, il ouvre la porte du caisson et deux belles motos apparaissent intactes sur leurs supports. Wow! C’est vrai maintenant. Nous n’avons plus le choix. Nous devrons revenir au Québec avec ces motos. Et le Québec est loin, vraiment très loin!

Une fois les machines prêtes, nous les enfourchons en direction de Homer. La température est parfaite. C’est une journée très ensoleillée avec une température de 23°C. Il y a tout de même un fond de fraicheur dû aux glaciers environnants, mais c’est très confortable. Le trajet dure quatre heures. Nous en profitons pour nous arrêter à quelques reprises afin de contempler les paysages grandioses.

Nous arrivons en fin de journée à Homer. Cette petite ville portuaire est très populaire auprès des citoyens de la région d’Anchorage. Il y a foule! Ils viennent tous camper sur la péninsule. Celle-ci est entourée de montagnes enneigées et d’une ouverture sur l’océan Pacifique. Nous rencontrons des gens extraordinaires durant cette première soirée. Par contre, la température commençait à descendre. Je décide donc de me prendre une chambre d’hôtel puisque de toute façon, la tente est sérieusement trop étroite pour deux adultes. Il ne restait qu’une seule chambre libre en ville! Francis décida de rester sur place. Nous nous donnons rendez-vous le lendemain matin.

À mon réveil, il pleuvait avec une température de 10°C! En voyant Francis arriver, j’ai su que la chambre d’hôtel avait été un bon choix finalement! Pour cette deuxième journée, il est convenu d’aller à Whittier. Pour nous y rendre, nous devons traverser le plus long tunnel ferroviaire des États-Unis; 4 km. On l’appelle le Trou du diable. Il traverse la montagne sous le glacier Portage. On ne peut accéder à ce village que de cette manière ou par voie maritime. La traversée se fait d’abord par train, pour les piétons et cyclistes, puis les autres véhicules suivent ensuite. C’est un endroit très impressionnant, mais malheureusement pour nous, il pleuvait.

Jour 3 de l’aventure, nous prenons un traversier en direction de Valdez, village où eut lieu le déversement pétrolier en 1989. Le trajet est d’environ 150 km. La traversée s’effectue à travers les fjords. Beaucoup de glaces obstruent la route à cause des glaciers qui terminent leur course dans la baie. De retour sur la terre ferme, nous longeons un superbe canyon sur la route qui nous mène vers le Yukon.

Le jour suivant nous amène au Canada. On voit immédiatement la différence par les routes. On nous avait parlé de cette route qui était une étape très difficile. Les routes du Québec sont belles en comparaison! Le climat est rude dans cette région. Nous sommes maintenant davantage au nord. Le paysage se distingue par des arbres très petits, des montagnes majestueuses et de magnifiques lacs bleus. Nous nous arrêtons à Whitehorse. Encore une fois, la chaleur des gens nous frappe. L’étape la plus difficile est à venir pour le lendemain puisque nous traverserons le sud du Yukon et le nord de la Colombie-Britannique. Une section avec très peu de population.

Six jours se sont écoulés depuis notre départ lorsqu’un incident survient. Après avoir choisi une route sinueuse, aveuglé par le soleil, j’ai manqué une courbe en direction de Whistler, en fin de journée, près du village de Lilooet. Je roulais à une vitesse d’environ 70 km/h. La chaleur accablante, contrastante avec le climat rencontré plus au nord ces derniers jours, me faisait souffrir de douleur. Par chance, je n’ai rien de cassé et la moto n’est pas trop abîmée. Je me sens loin de chez moi. Mes blessures se limitent à quelques lacérations, ecchymoses et douleurs musculaires.

Malgré cet incident, le moral reste inébranlable. Nous sommes attendus à Vancouver chez des amis qui y habitent depuis quelques années. Après un saut à Whistler, nous nous sommes dirigés vers Vancouver. Cette ville est merveilleuse. La meilleure période dans l’année pour la visiter est sans aucun doute durant l’été. Le climat y est plus sec et beaucoup plus ensoleillé. Nous logeons près de Kits Point. Il y a une superbe plage sur laquelle nous prenons le temps de relaxer. Elle est bondée de monde. Il y a une ambiance qui est très caractéristique de la côte ouest, donc plus relaxe que ce à quoi nous sommes habitués au Québec. Cette fin de semaine là nous permet de prendre une pause de moto. Il faut dire qu’en une semaine, nous avons déjà parcouru plus de 3 600 km. L’esprit est à la fête.

Après une fin de semaine mémorable, nous devons poursuivre notre itinéraire. De retour aux États-Unis, nous nous engageons profondément dans les terres afin de nous rendre au mont Saint Helens. Les routes sillonnent les montagnes jusqu’à destination. À notre arrivée, il est inconcevable de quantifier la force nécessaire pour détruire une pareille montagne. Nous prenons la route du cratère. Nous devons traverser une zone appelée Dead Zone, laquelle démontre la puissance du souffle exercé par le volcan. Tout y est exterminé sur un rayon de 13 km! Le cratère est impressionnant. Une légère fumée s’en dégage. Depuis 2007, l’activité volcanique a repris. Après la visite, nous décidons de replonger dans la forêt où nous allons ériger la nouvelle tente que nous avions achetée.

Dur réveil. La forêt est un milieu très humide. Un copieux déjeuner nous a rapidement remis sur pieds. Nous enfourchons nos motos en direction sud pour l’Oregon. Nous nous dirigeons vers un endroit appelé Craterelake qui nous avait été conseillé. Ça valait le détour. Le site est incroyable. C’est un ancien volcan qui s’est rempli d’eau. C’est d’ailleurs le lac le plus profond des États-Unis et l’un des plus profonds au monde avec ses 592 m. C’est, de plus, un lac situé en haute altitude. Le plus haut sommet du site culmine à près de 3 000 m. Il y avait encore de la neige lors de notre passage.

Il fait de plus en plus chaud au fur et à mesure que nous nous dirigeons vers le sud. C’est maintenant le temps de regagner la côte en direction de la Californie. Le décor est changeant. Nous voici en Californie, terre de contrastes, tantôt aride, tantôt humide. Après les sommets enneigés, nous traversons la fabuleuse Redwood Forest avec ses arbres géants. Les maisons paraissent minuscules vis-à-vis ces monstres. La route est toujours aussi incroyable avec ses courbes interminables. Nous nous dirigeons vers la légendaire route nº 1 en direction de San Francisco. Nous parcourons une section très technique comportant d’innombrables courbes, toutes à moins de 30 km/h. On y retrouve des montées, des descentes, des lacets à répétition, des 90° et des points d’exclamation sur les panneaux indicateurs. On sent clairement que nous nous rapprochons de la côte, l’air salin se fait sentir.

La première section de la route  se déroule dans une forêt dense, la deuxième partie est une alternance entre dense et clairsemé, puis l’océan! Les pneus ont eu chaud. La gomme frise! Le temps a complètement changé. C’est devenu très humide et nuageux. Il fait environ 15°. Le contraste est frappant. Pourtant, cinq minutes auparavant, il faisait près de 30°! Il y a un phénomène très particulier durant cette période de l’année. Compte tenu de la chaleur accablante dans les terres, l’air marin y est aspiré. Ce qui crée une bande de nuages en bordure de la côte. Nous poursuivons notre route sur la 1, cette route incroyable. C’est, de loin, le plus beau terrain de jeu pour les motards. Les pneus s’arrondissaient de plus en plus au fur et à mesure que nous enchainions les courbes.

San Francisco! Le Golden Gate apparait devant nous. La cime des haubans est camouflée par le brouillard. Photo oblige et nous voilà repartis. L’air est toujours frais. Nous traversons la ville sans toutefois nous arrêter, car il n’était pas prévu de la visiter. Ce sera partie remise.
Cela fait près de deux semaines que nous avons entrepris le périple. Depuis le début, j’ai pris des centaines de photos, toutes plus impressionnantes les unes que les autres, avec mon téléphone. J’avais l’habitude de le déposer dans ma poche de manteau. Après avoir traversé San Francisco, j’ai voulu prendre une photo sur le bord de la mer. Malheur! L’appareil n’était plus dans ma poche.

Il m’arrive quelques fois de le mettre ailleurs, mais non, il avait disparu! Francis est arrivé à mes côtés et m’a demandé ce qui se passait. Je lui ai expliqué que je ne trouvais plus mon téléphone. Il m’a répondu qu’il avait vu quelque chose éclater en mille morceaux sur l’autoroute, quelques minutes plus tôt. Quoi?! J’étais dans tous mes états… Par chance, Francis a pris à peu près les mêmes photos avec son appareil.

Depuis le début, nous rêvons des plages californiennes. Nous décidons d’arrêter à Pismo Beach. C’est un endroit très touristique. Ça change des milieux isolés. Sur la côte, l’air est  frais, ce qui compromet sérieusement l’idée de la plage et de tous ses agréments… Nous passons la nuit et profitons des bars pour nous consoler. Le lendemain matin, nous devons nous arrêter pour un changement d’huile. Cette pause nous permet d’échanger avec les gens sur place. Ils nous proposent un itinéraire qu’ils empruntent fréquemment à travers les vignobles. Nous suivons leur idée. Nous avons sillonné des routes pittoresques à travers les domaines. Magnifique. Nous sommes même allés faire quelques dégustations!
La chaleur est maintenant pénible à l’extérieur. Nous nous sommes engagés à l’intérieur des terres. Nous décidons de ne pas poursuivre vers le sud jusqu’à San Diego. Il est convenu d’aller à Las Vegas avant de retourner au Québec par le Midwest américain où d’incroyables aventures nous attendent!

À suivre dans le prochain numéro…

Christian Lacroix

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