ARCHIVES – Yamaha MT-10 SP 2022

Par Didier Constant Photos © Didier Constant, Richard Turenne, YamahaPublié le

Sportive et performante !

Cet été, j’ai eu le plaisir de découvrir la Yamaha MT-10 SP 2022, la successeure de la FZ-10 au sommet de la catégorie des sportives dénudées du constructeur d’Iwata City, une machine pour laquelle j’ai toujours eu un faible.

Chez Yamaha, les versions SP s’adressent aux motocyclistes exigeants qui réclament le meilleur, particulièrement en matière de suspension et de rigueur de pilotage. Les SP sont des motos plus exclusives, produites en petite série, pour des connaisseurs prêts à payer le surplus exigé par Yamaha.

La MT-10 SP est la plus délinquante et la plus puissante streetfighter de la marque. Ses principales rivales sont les Aprilia Tuono V4, Ducati Streetfighter V4, Honda CB1000R, Kawasaki Z H2, KTM 1290 SuperDuke R EVO, Suzuki GSX-S1000 et Triumph Speed Triple 1200 RS. Des machines caractérielles au style radical, certaines vendues très cher. Et bien qu’elle ne soit pas la plus performante du lot, la Yamaha a de nombreux arguments en sa faveur (suspensions électroniques, puissance élevée, châssis affûté, électronique avancée, prix compétitif, performances étonnantes) pour bien figurer dans le segment des roadsters extrêmes.

Quand j’ai pris possession de la MT-10 SP au bureau de Yamaha Canada, sur la Rive-Sud de Montréal, j’ai immédiatement retrouvé la plastique torturée de l’ancienne FZ-10, bien que les designers de la marque aient travaillé fort pour l’actualiser, tout en gardant une certaine familiarité avec l’originale. Visuellement, la nouvelle SP se démarque par son mini-carénage abritant deux phares à DEL monofocus avec des feux de position localisés en dessous, mais aussi par sa robe à la fois bleue, noire et gris argenté, baptisée « Liquid Metal/Raven » par Yamaha — la seule disponible pour la SP —, qui est emblématique du modèle. Il faut aimer pour apprécier. Moi, j’aime bien. Ça me rappelle la R1M.

UN MOTEUR ÉTONNANT

L’exubérant moteur CP4 de la MT-10 SP est essentiellement le même que celui qui équipe la YZF-R1, la superbike à moteur crossplane de la marque. Il s’agit du quatre cylindres en ligne liquide, à double arbre à cames en tête et 16 soupapes. Sur la MT, il développe 165,9 chevaux à 11 500 tr/min pour un couple de 82,6 pi-lb à 9 000 tr/min. Le CP4 adopte de nouveaux réglages d’injection et des modifications de l’admission et de l’échappement destinées à renforcer le couple à bas et moyen régime. On trouve donc un trio de conduits d’admission d’air qui alimentent la nouvelle boîte à air ainsi que de nouvelles grilles d’amplification acoustique de chaque côté, à l’avant du réservoir, qui redirigent le bruit d’admission directement dans le cockpit. La SP est également munie d’un embrayage antiglissement assisté. Bien qu’elle soit compatible Euro5, la MT-10 SP est légèrement plus puissante et coupleuse que la FZ-10 originale que j’avais découverte lors de son lancement canadien, en 2016 (160,4 chevaux et 81,8 lb-pi de couple). En 2022, elle est dotée d’une excellente boîte de vitesse à six rapports secondée par un excellent quickshifter bidirectionnel. Personnellement, je l’adore.

UN ARSENAL ÉLECTRONIQUE COMPLET

La MT-10 SP dispose d’une armada de béquilles électroniques pour contenir toute cette puissance et soutenir la technologie inédite de sa suspension. Elle comprend, entre autres, une unité de mesure inertielle à six axes, ce qui signifie que toutes les aides au pilotage — contrôle de la glisse (SCS), antipatinage, ABS, anticabrage (LIF), contrôle du freinage (BC) et gestion du frein moteur (EBM) — sont sensibles à l’inclinaison et fonctionnent donc en virage. De plus, il ne faudrait pas oublier la poignée de gaz ride-by-wire APSG, avec quatre modes de puissance sélectionnables, ni le système Yamaha YCC-T. Il y a même un limiteur de vitesse maximale programmable appelé « Yamaha Variable Speed Limiter » (YVSL) et un régulateur de vitesse très pratique au demeurant. Celui-ci est opérant entre 50 et 160 km/h.

La SP propose quatre modes de conduite — A (le plus sportif), B (plus doux), C pour un usage urbain et D pour la pluie — regroupés dans le contrôle de pilotage YRC. Les quatre modes du YRC ont des valeurs prédéfinies, mais le pilote de la MT-10 peut choisir de réinitialiser les différents paramètres selon ses préférences.

La moto est dotée d’un écran ACL de 4,2 pouces, dérivé de la R1, qui fournit des informations essentielles sur la conduite et permet de naviguer plus facilement dans la myriade de réglages, à travers lesquels on peut facilement se perdre. En plus, elle possède des feux à DEL.

Comparativement à la MT-10 de base, la SP est équipée d’une foule de composants high-tech, dont le plus surprenant est la nouvelle suspension électronique semi-active Öhlins de deuxième génération (Gen-2). La SP est la première moto de production à bénéficier de cette suspension géniale. Celle-ci se compose d’une fourche NIX 30 améliorée et d’un amortisseur arrière TTX 36 perfectionné qui, selon Öhlins, permet un réglage de l’amortissement plus rapide tout en offrant une sensibilité et une réactivité accrues aux extrémités basses et hautes de la plage de réglage. Cette suspension dispose de trois modes semi-actifs (A1, A2, A3) et de trois modes manuels (M1, M2, M3). Parmi les premiers, le mode A-1 est le réglage sport/piste par excellence, le mode A-2 est plus adapté à la route tout en restant sportif et le mode A-3 est le réglage « Sport/GT », celui qui favorise le tourisme et le confort. Les modes M, quant à eux, vous permettent de régler électroniquement la suspension à votre goût, puis de mémoriser vos réglages.

UNE PARTIE CYCLE AFFÛTÉE

Contrairement aux autres MT, qui utilisent leur propre cadre en aluminium formé sous vide, la MT-10 SP reprend le cadre Deltabox en aluminium de la YZF-R1. C’est le même que celui utilisé par Yamaha en WSBK. Le Deltabox est toujours aussi rassurant. Il offre une grande rigidité longitudinale ainsi qu’une certaine flexion latérale et torsionnelle. Juste ce qu’il faut pour performer au plus haut niveau. Sur la SP, il est complété par un superbe bras oscillant en alu brossé.

Les valeurs de géométrie (chasse/déport de 24°/102 mm) et l’empattement court de 1 405 mm confèrent à la MT-10 SP un comportement de supersportive premium. Relativement agile et facile à balancer d’un angle sur l’autre, elle est agréable à piloter rapidement et très efficace à l’attaque, particulièrement sur une route au revêtement impeccable.

À l’usage, la SP affiche un comportement très orienté piste favorisant rigueur, précision et performance. En ce qui concerne les suspensions, le mode A-1 est brutal et raide, tout comme le mode A-2, qui reste assez sec. Dans les deux premiers modes, les suspensions sont rigoureuses, mais manquent de confort en usage routier. Elles secouent pas mal le pilote sur une chaussée inégale. Il faut sélectionner le mode A-3 pour retrouver une conduite plus souple et contrôlée. C’est celui que j’ai privilégié durant cet essai effectué majoritairement sur les routes secondaires du réseau routier québécois.

La polyvalence de la suspension Öhlins SV Gen-2 pilotée électroniquement est surprenante. La MT-10 SP réunit vraiment trois motos en une qui se relayent selon les réglages adoptés par le pilote — pistarde, sportive ou Sport/GT —, chacune facilement accessible à la simple pression d’un bouton. Comparativement à la BMW S 1000 R que j’ai essayée l’an dernier, sa plus proche rivale, la SP est plus lourde de 14 kg, plus lente dans les changements de direction rapides et elle n’est pas aussi maniable, mais sa suspension semi-active égale, voire surpasse celle de la BMW.

Pour ce qui est du freinage, doté de l’assistance brake control, il offre mordant et modularité. Il se compose d’un maître-cylindre radial Brembo, d’un double disque de 320 mm avec étriers quatre pistons à fixation radiale à l’avant et d’un monodisque de 220 mm avec étrier simple piston à l’arrière. L’ABS actif en virage est transparent et efficace. Des durites de type aviation en métal tressé complètent le système et garantissent une meilleure endurance du freinage.

Yamaha a délaissé les populaires étriers Stylema de Brembo, que l’on retrouve sur la majorité des sportives, pour des éléments Advics qui se révèlent impressionnants. Le levier offre beaucoup de ressenti, de finesse de toucher et de rétroaction. Par ailleurs, les freins ne sont pas trop agressifs en usage routier. L’ABS en virage est un ajout apprécié.

Enfin, les jantes bleues en aluminium, à cinq branches, sont chaussées de pneus Bridgestone Battlax Hypersport S22, des gommes plutôt sportives offrant une excellente motricité, même sur l’angle.

LE TEST DE LA ROUTE

Durant cet essai estival, j’ai roulé un peu en ville, un peu sur l’autoroute, mais surtout sur des routes secondaires. La SP s’y prête bien et s’exprime mieux sur ce type de parcours.

Dans la circulation urbaine, elle se sent un peu à l’étroit, bien qu’elle soit agile et qu’elle se faufile bien dans le trafic. On dirait un pitbull qui tire sur son collier au point de s’étrangler. La SP a besoin d’espace pour s’exprimer et d’asphalte de qualité pour donner le meilleur de sa tenue de route.

Sur l’autoroute, la protection est moyenne — la version qui m’a été prêtée était équipée d’une bulle haute optionnelle qui protégeait mieux —, et la vitesse, trop étroitement surveillée pour que l’on puisse réellement prendre du plaisir au guidon du streetfighter de Yamaha. Dans ces conditions, on ne profite pas pleinement de ses équipements premium, dont ses suspensions semi-actives et ses Bridgestone S22.

Mais, une fois sur les petites routes, c’est une autre histoire, comme je l’ai découvert à l’occasion d’une boucle de 800 kilomètres en deux jours, par les routes secondaires, dont la 132, entre Montréal et Québec. Pour l’occasion, j’avais équipé la SP pour le tourisme léger : sac de réservoir GIVI XS319 Tanklock, sac de selle GIVI UT813 Ultima-T et support de téléphone SP-Connect. Il n’en faut pas plus pour partir quelques jours en escapade, d’autant plus que la selle de la Yamaha, bien que ferme, est étonnamment confortable pour un roadster radical.

Lors de cette balade sportive, la température était magnifique. Il faisait un soleil radieux, le thermomètre indiquait 25 °C, et il y avait peu de vent. Pour l’occasion, j’étais accompagné par des compagnons de voyage agréables sur une BMW R18 Transcontinental, une Kawasaki Versys 650 et une BMW NineT Pure. Chacun a fait un bout de chemin avec moi, soit à l’aller, soit au retour.

Dans cet environnement, le CP4 est envoûtant et frôle le sans-faute. C’est un des meilleurs quatre cylindres du marché. Il offre un compromis parfait entre performances et sensations. Son calage crossplane lui confère une sonorité et un comportement proches de ceux d’un V4. Sa plage d’utilisation est large, avec passablement de couple à bas et moyen régime, une puissance phénoménale haut dans les tours et des performances époustouflantes. Cependant, il manque un peu de souplesse et rechigne à reprendre sans à-coups en bas de 1 500 tr/min, particulièrement sur les rapports supérieurs. Comme sur un V4, il faut jouer du sélecteur pour le garder dans sa plage efficace et profiter de sa générosité. Heureusement, le quickshifter s’avère un précieux allié en la circonstance, grâce à son efficacité et à sa précision, à la montée comme à la descente des rapports. L’embrayage à glissement limité favorise une conduite enthousiaste. On reprochera toutefois au quatre cylindres en ligne sa consommation un peu élevée (7,8 l/100 km de moyenne en conduite normale et près de 9 l/100 km à l’attaque). Enfin, il est admirablement appuyé par des suspensions semi-actives tout simplement ahurissantes d’efficacité une fois qu’on les a adéquatement réglées.

La partie cycle impressionne par sa rigueur et son efficience. Une vraie sportive, particulièrement sur un bitume en bon état. En 2016, lors de mon essai de la FZ-10 originelle, on avait pu faire une demi-journée de piste au défunt circuit de St-Eustache. C’est mon ami Patrick Laurin qui s’y était collé, car j’officiais en tant que photographe ce jour-là. Malheureusement, cette année, je n’ai pas pu faire de piste avec la MT-10 SP. Il m’a été impossible de trouver une date pour une journée de roulage, et, de toute manière, aucun de mes photographes habituels ne pouvait m’accompagner. En plus, je n’avais pas les moyens de remplacer les pneus pour rendre la moto à Yamaha dans l’état où je l’avais prise. J’ai donc dû faire contre mauvaise fortune bon cœur et me suis résolu à tester le potentiel sportif de la SP sur une route de Lanaudière que je connais par cœur et qui se prête bien à ce genre d’exercice. Je sais, ce n’est pas la même chose, mais faute de grives on mange des merles. C’est mieux que mourir de faim, non?

Dans ces conditions, la MT-10 SP est crapuleuse, mais ô combien précise et rigoureuse! Elle est intègre et prévisible dans les virages serrés, relativement vive dans les enchaînements malgré son surplus de poids, et hyper stable dans les grandes courbes rapides. Facile à placer sur l’angle, elle offre une motricité sans faille grâce à ses Bridgestone S22 et à ses suspensions. Il faut seulement faire attention de ne pas s’égarer dans les réglages si vous choisissez un des modes manuels.

En matière de confort, la Yamaha n’est pas une GT, encore moins une moto de tourisme, mais elle propose une ergonomie adéquate et une position de conduite en adéquation avec son caractère, le buste légèrement penché vers l’avant, les pieds relevés et les bras un poil écartés en raison du large guidon tubulaire. Prête à l’attaque! De plus, les commandes tombent bien sous la main. On reprochera seulement au poste de commande d’être chargé. Il faut prendre le temps d’ajuster les modes et les béquilles électroniques avant de partir, car, une fois en roulant, ça devient plutôt compliqué, d’autant que l’écran TFT est petit et difficile à lire.

POUR FINIR

À l’occasion de cet essai, je suis retombé sous le charme de la sportive dénudée de Yamaha. J’ai retrouvé son tempérament délinquant ainsi que son goût pour les escapades crapuleuses et les figures de style extrêmes. Dans sa version SP, la MT-10 offre un comportement irréprochable, quels que soient l’environnement et les conditions. Cependant, elle demande une implication totale de la part du pilote, qui ne peut pas se reposer sur ses lauriers. Il doit être alerte, attentif et ne pas se laisser envahir par l’émotion. Il lui faut garder le contrôle sur la MT en toute situation. À ne pas mettre entre toutes les mains…

Dérivée de la YZF-R1, dont elle reprend le moteur en version dégonflée et l’essentiel de la partie cycle, la MT-10 SP est un streetfighter radical capable de rivaliser avec les meilleures machines du créneau, européennes incluses. Elle offre des performances époustouflantes, une suspension semi-active géniale et un équilibre bluffant.

Le CP4 qui la propulse est l’un des quatre cylindres modernes les plus enthousiasmants du marché, fournissant de la puissance et du couple en abondance. Son arsenal électronique à la fine pointe de la technologie s’avère efficace dans toutes les situations possibles et imaginables, tout en garantissant votre plaisir et votre sécurité, d’autant plus que son châssis affûté est à la hauteur de la tâche, quels que soient l’environnement et le rythme adopté.

La Yamaha MT-10 SP est proposée dans un coloris unique bleu, noir et gris argenté, baptisé « Icon Performance ». Elle est en vente chez votre concessionnaire Yamaha préféré à un prix de détail s’élevant à 21 599 $ en 2023.

FICHE TECHNIQUE

INFORMATIONS GÉNÉRALES

Poids tous pleins faits : 213 kg

Hauteur de selle : 835 mm

Capacité essence : 17 L

Consommation : 7,8 L/100

Autonomie : 218 km

Durée de l’essai : 800 km

Prix : 21 599 $ (modèle 2023)

Coloris : bleu/noir/gris argenté « Liquid Metal/Raven »

MOTEUR

Moteur : quatre cylindres en ligne, DACT, 4 soup./cylindre, refroidissement liquide

Puissance : 165,9 ch à 11 500 tr/min

Couple : 82,6 pi-lb à 9 000 tr/min

Cylindrée : 998 cc

Alésage x course : 79 x 50,9 mm

Rapport volumétrique : 12:1

Alimentation : injection Mikuni à corps de 45 mm

Transmission : 6 rapports

Entraînement : par chaîne

PARTIE CYCLE

Suspension : fourche inversée Öhlins SV Gen-2 pilotée électroniquement, tubes de 43 mm entièrement paramétrables. Monoamortisseur Öhlins SV Gen-2 piloté électroniquement, entièrement paramétrable.

Empattement : 1 405 mm

Chasse/Déport : 24°/102 mm

Freins : double disque de 320 mm et étriers quatre pistons à fixation radiale à l’avant; monodisque de 220 mm avec étrier simple piston à l’arrière. ABS actif en virage de série. Durites de type aviation en métal tressé.

Pneus : Bridgestone Battlax Hypersport S22
120/70ZR17 à l’avant;
190/55ZR17 à l’arrière.

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