Jean-François Mercier: Goûter la moto

Par Samuel ParéPublié le

En 2001, impressionné par la nouvelle Kawasaki Mean Streak de Louis Morissette, l’humoriste Jean-François Mercier décide d’obtenir son permis de moto et achète sa première machine : une Kawasaki Mean Streak de l’année, ce qui ne manquera pas d’agacer son ami… Dix-sept ans plus tard, la moto le passionne comme au premier jour. Moto Journal a rencontré Jean-François Mercier le motocycliste au resto-bar sportif B-Sports de Richelieu, un endroit où l’humoriste termine souvent ses sorties en moto par un bon repas.

À première vue, la moto – et particulièrement l’Indian Chieftain Dark Horse 2018 qu’il conduit – complète bien l’image de dur à cuir que l’humour violent du « gros cave » colle à la peau de Jean-François Mercier, et l’humoriste ne rejette pas complètement cette imagerie : « Tu joues un peu au tough, quand t’es là-dessus. Ce sont les “vrais” qui font de la moto, et tu te fais accroire que tu es comme eux tant que tu ne t’arrêtes pas », remarque-t-il, qualifiant son sentiment de « niaiseux ». Au-delà d’un joli élément de décor dans le garage-studio du très macho « King de V », la moto constitue une véritable passion pour Jean-François Mercier, et ce, depuis le début : « La première année, j’ai fait 20 000 kilomètres. Maintenant, je fais entre 7 000 et 10 000 kilomètres par année, et j’ai encore bien du fun à rouler. Parfois, je me dis que je pourrais arrêter, mais c’est pas mal l’affaire qui me rend heureux dans la vie », confie l’humoriste. La concentration requise par l’expérience de conduite directe caractéristique de la moto et le nouvel univers qui accueille tout motocycliste lui offrent des moments de détachement salutaire dans sa vie quotidienne.

Faire corps avec la route

Pour Jean-François Mercier, la moto s’avère une expérience de conduite totale, et c’est pourquoi il se décrit avant tout comme un « gars de balade » : « La plupart du temps, je pars seul. La dernière ride que j’ai faite, j’ai monté la 10 jusque dans les Bois-Francs et je suis revenu par la 116. Je suis parti cinq heures de temps et ne me suis arrêté qu’une fois pour faire le plein d’essence et manger un cornet. Quand je suis seul, j’aime ça rouler », raconte celui qui fait régulièrement ce genre d’escapades.

Du point de vue technique, la conduite d’une moto se démarque de celle des autres véhicules en ce qu’elle permet pratiquement de faire corps avec la route : « Rouler n’importe quelle moto, c’est plus le fun que rouler n’importe quel char : le trip de conduire une Suzuki [LS 650] Savage monocylindre se trouve plus grand que celui de piloter une Ferrari à 500 000 $ parce que t’es exposé et que c’est dangereux. La moto est vraiment intéressante pour quelqu’un qui aime conduire, car tout est manuel : même levirage, tu le fais toi-même en transférant ton poids », explique Jean-François Mercier en soulignant au passage qu’un motocycliste n’a qu’à dépenser 20 000 dollars pour acquérir une moto aussi performante qu’une voiture quinze fois plus chère.

Outre la performance, la connaissance que le conducteur a de sa machine est centrale quant à l’expérience de conduite : « J’avais une VFR 800 et une VTX 1800. Honnêtement, je prenais les virages plus serré avec ma VTX parce que je la connaissais plus », relate celui qui a été commandité par Honda. D’ailleurs, selon l’humoriste, les motos japonaises, bien qu’elles inspirent généralement peu de respect aux motocyclistes nord-américains, sont « meilleures » que les motos américaines. Toutefois, les motos qu’il a préférées proviennent autant du Japon que des États-Unis : « La VTX [1800], je l’ai vraiment aimée : elle était super puissante et très belle. J’ai eu une [Gold Wing] F6B de Honda aussi. L’Indian [Chief] Vintage, je l’ai adorée », confie-t-il, trouvant difficile de faire un tel classement.

Jean-François Mercier est également satisfait de l’Indian Chieftain Dark Horse 2018 qu’il possède actuellement : « Depuis que je l’ai modifiée, les poignées tombent parfaitement, elle a une radio, je suis vraiment bien dessus, et parfois tellement que j’oublie que je suis sur une moto », explique celui qui a installé un siège d’Indian Roadmaster sur son engin. Cette moto convient parfaitement au style de conduite qu’il adopte en vieillissant : « Je suis rendu à cet âge-là : tu deviens nécessairement plus contemplatif quand tu vieillis », remarque l’humoriste, qui prête davantage attention au paysage lors de ses balades.

La moto comme expérience humaine

Si la moto permet de mieux sentir la route et d’admirer le paysage, la concentration requise de la part du motocycliste pour que cette expérience de conduite directe demeure sécuritaire fournit à Jean-François Mercier un accès tout aussi immédiat à lui-même dans un contexte où ses préoccupations habituelles sont mises de côté. Même les risques inhérents à la conduite d’une moto favorisent en quelque sorte la dimension thérapeutique de cette passion : « Si quelqu’un dit : “Moi, ça me fait peur”, c’est presque sûr qu’il va aimer ça. J’ai eu une blonde qui était réticente, et j’ai vraiment insisté pour qu’elle passe son permis de moto. Quand j’ai compris que je voulais plus qu’elle, j’ai arrêté de la pousser, et c’est à ce moment qu’elle a décidé de le faire pour elle. Ça n’a pas été facile, mais elle l’a réussi. Faire de la moto lui a donné beaucoup de confiance; en fait, c’est se dépasser soi-même », raconte l’humoriste.

Pour Jean-François Mercier, la peur, bien qu’il ressente parfois quelques frissons au guidon d’une moto, n’est pas un obstacle. Chez lui, les bienfaits psychologiques de la moto se manifestent plutôt par un sentiment de liberté : « Tu penses à rien. Quand tu couches ton bicycle sur l’asphalte pour tourner, t’en n’as pas de problèmes », confie-t-il, remarquant non sans dérision qu’il n’est pas très « différent » des autres sur ce point. Ce vide dans sa pensée concerne également l’humoriste en lui : « Dans le processus créatif, il y a une période d’incubation. Quand t’es en moto et que tu penses à rien, c’est comme si c’était ton inconscient qui travaillait à ta place. En création, travailler tout le temps est parfois contre-productif », explique celui qui avoue aussi se trouver beau sur sa moto, un sentiment qu’il éprouve rarement.

Si l’expérience individuelle de la conduite permet à Jean-François Mercier de se distancier temporairement de sa pratique humoristique, l’esprit de camaraderie qui unit les humoristes sur la scène lui rappelle celui qui règne dans le monde de la moto : « J’aime bien la confrérie de moto. On a ça aussi en humour : il y a une hiérarchie – des vedettes sont plus grosses que d’autres, des jeunes commencent, etc. –, mais quand on se retrouve sur une scène, on est tous égaux. La moto, c’est un peu ça. Tu arrives sur ta moto, et ça se met à te jaser de moto, et tout le monde est au même niveau là-dedans. Ça me donne accès au vrai monde, à d’autres gens que des artistes. Nous sommes tous des passionnés », s’enthousiasme l’humoriste, pour qui cette « confrérie » représente l’un des plus beaux aspects de la moto.

Bien qu’il aime rouler seul, Jean-François Mercier a, au sein de la communauté motocycliste, quelques amis qui l’accompagnent plus souvent, comme Bob, un briqueteur toujours prêt à enfourcher sa moto. Le comédien Jeff Boudreault, un autre passionné de moto interviewé par Moto Journal l’an dernier, entraîne également son ami humoriste dans des rides mémorables : « Le plus gros trip que j’ai fait, c’est avec Jeff Boudreault; il y avait aussi Carl Nadeau et Francis Vachon. On est partis trois jours, et on a eu beaucoup de fun, bien qu’on n’ait pas fait beaucoup de kilométrage. Il nous est arrivé plein d’aventures : à Trois-Rivières, Jeff a laissé sa lumière ouverte pendant le dîner et il a manqué de batterie; il a donc fallu courailler pour trouver une batterie; à un moment, il est parti, et un gars nous courait après parce qu’il avait oublié ses clés. Ç’a été un des trips le plus le fun que j’ai faits », estime Jean-François Mercier, qui apprécie également les poker runs et rouler avec l’équipe de Motos Illimitées. Il n’a pourtant jamais fait de voyages de moto à proprement parler : « Tout le monde qui fait de la moto se dit : “Je vais faire la Route 66, Tail of the Dragon, etc.”, mais, dans les faits, je ne sais pas quand je vais faire ça. Il faudrait que Jeff m’appelle, ce n’est pas le genre de choses que je ferais spontanément », confie l’humoriste.

Qu’il parcoure ou non les routes légendaires de la moto un jour, Jean-François Mercier assure que la moto fait partie de ses projets d’avenir : « Je crois que je vais toujours avoir une moto », lance-t-il. Après 17 ans de balade au Québec, l’humoriste conseille aux motocyclistes de chez nous d’explorer la route 381 de l’arrondissement saguenéen de La Baie à Baie-Saint-Paul, la route 155 de Shawinigan à Chambord, la route 329 de Saint-Donat à Sainte-Agathe-des-Monts et le Chemin des Patriotes (route 133). Et à ceux qui n’ont jamais enfourché une moto, il souhaite, en vrai passionné, de vivre cette expérience unique : « Tu as l’impression d’avoir quelque chose de plus que ceux qui ne font pas de moto. Le sentiment doit être le même pour n’importe quelle activité, mais la moto, tu souhaites pas mal à tout le monde de goûter ce que c’est. »

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