Buell XB12STT 2007, pur sang

PAR Costa MouzourisPosted on

Bien qu’il semble s’agir d’une simple variation des modèles existants, la Buell XB12STT 2007 possède une personnalité aussi distincte que son concepteur, Eric Buell. Nous étions environ une douzaine dans un restaurant, à attendre autour d’une grande table ronde que notre dîner soit servi. Nous venions de passer la matinée à rouler sur les routes pavées les plus tortueuses que je n’ai jamais eu la chance de fouler, et maintenant, nous nous racontions nos expériences sur la route. Chacun de nous, à tour de rôle, relatait les péripéties qu’un autre venait tout juste de lui narrer, et les récits faisaient tranquillement le tour de la table. Finalement, le concepteur en chef et PDG de Buell Motorcycles, Eric Buell, nous a parlé d’une réunion de concessionnaires à laquelle il avait assisté l’année dernière, et où il avait eu l’occasion de piloter successivement un modèle Ulysses et un autre modèle Buell, la CityX. Il nous a confié que c’est à ce moment précis qu’il a eu l’idée de construire une moto qui se situerait à mi-chemin entre ces deux modèles : une moto légère, maniable et aussi amusante à piloter que la CityX de 984 cm3, mais avec la puissance, les suspensions à long débattement et la tenue de route de la Ulysses de 1203 cm3 à empattement supérieur. C’est ainsi que la XB12STT vit le jour!

À l’instar de tous les modèles Buell, à l’exception de la Blast, la conception de la XB12STT s’appuie rigoureusement sur ce que le constructeur qualifie de «trilogie technologique», un concept qui met fortement l’accent sur la centralisation des masses, la rigidité du cadre et la réduction des poids non suspendus. Les modèles Buell XB sont des exemples extrêmes d’au moins deux de ces principes : la centralisation des masses et la réduction des poids non suspendus. Les Buell sont les seules motos construites actuellement dont le réservoir d’essence se situe dans le cadre, plus près du centre de gravité de la moto qu’un réservoir d’essence traditionnel qui en est plus éloigné. De plus, les longs échappements de la XB, qui ont souvent été critiqués pour leur apparence qui semble convenir davantage à un VUS, sont placés sous la moto, soit très près de son axe de roulement.

Trois aspects de la tenue de route sont influencés par l’emplacement du centre de gravité d’une moto : le roulis, la plongée et le déportement. Le roulis est la transition entre les mises sur l’angle, y compris verticalement. La plongée est le balancement avant-arrière qu’une moto produit sous la force de freinage ou en pleine accélération. Le déportement est plus difficile à expliquer, mais en gros, il s’agit du mouvement qu’effectue la moto lorsque son centre de gravité dévie de sa trajectoire, ou comme Buell l’a expliqué : le déportement est le mouvement latéral que produit le train arrière d’une moto qui se défile en virage. En rapprochant la majorité du poids de la moto de son axe de roulement, la capacité de la machine à contrôler le déportement s’en trouve améliorée, ce qui permet au pilote de rattraper plus rapidement un dérapage. J’aurai l’occasion d’expérimenter ce phénomène un peu plus tard au cours de mon essai.

Durant la présentation technique tout juste avant l’essai routier, Eric Buell nous a démontré de quelle façon le poids influait sur le déportement. Pour ce faire, il a saisi un système d’échappement d’un modèle R de BMW entre le tuyau d’admission et le bout du tuyau d’échappement (approximativement où l’axe de roulement de la moto devrait se situer) et l’a fait osciller de gauche à droite. Cette démonstration se révéla physiquement épuisante, le lourd échappement décrivant un arc marqué en s’éloignant du corps de Buell ou, autrement dit, de son axe de roulement. Il s’empara ensuite d’un échappement de XB par le silencieux et répéta l’exercice, cette fois-ci sans fournir presque aucun effort, puisque la partie la plus pesante de l’échappement était rapprochée de son corps.

Une autre façon de favoriser la centralisation des masses consiste à abaisser autant que possible le poids des composants situés aux extrémités de la moto. À l’aide d’un pèse-personne, Éric Buell pesa les deux systèmes d’échappement; l’échappement de la BMW pesait à peine un peu moins que 16 kg, tandis que celui de la Buell affichait 9,5 kg. Puis, il refit la même démonstration mais avec la roue avant. Une roue de XB, avec son large disque simple monté sur la jante, son étrier et son essieu, pèse 10,9 kg, alors que la roue à disque double équivalente d’une Aprilia RSV1000 pèse 14 kg. Ces démonstrations, quoique pas très scientifiques, illustrent l’importance pour Buell d’abaisser le poids et de le ramener près de l’axe de roulement de la moto.

La STT, propulsée par le même bicylindre en V à 45 degrés de 1203 cm3 refroidi par air que toutes les autres Buell 1200, affiche un rapport volumétrique de 10:1 et est alimentée par un système d’injection à corps d’admission simple de 49 mm. Le moteur développe une puissance attribuée de 103 ch et produit un couple attribué de 86 lb-pi. Ce bloc à alésage supérieur est davantage reconnu pour sa puissance à bas régime que pour ses prouesses à haut régime, comme vous le rappelle l’interrupteur de régime qui s’actionne brusquement à 6 800 tr/min alors que le moteur est toujours en pleine accélération. La principale particularité de la STT réside toutefois dans son châssis, et une fois sur la route, elle gagne de nombreux points au chapitre de l’agrément de conduite.

L’assise relevée se veut un remarquable complément au châssis, procurant à la fois une excellente vision à l’avant (la hauteur de selle, qui est moyennement élevée, atteint 798 mm), et un contrôle équilibré durant des manœuvres serrées, renforcé par l’amplitude du mouvement du guidon. Son angle de direction limité compromet toutefois quelque peu sa maniabilité à basse vitesse, puisque le cadre élargi empêche la fourche de pivoter avec netteté. La selle est relativement large et plate, ce qui permet au pilote de se déplacer aisément lors des transferts de poids.

Selon l’itinéraire prévu en matinée, nous avons emprunté la célèbre autoroute californienne Ortega, qui passait par le lac Elsinore, avant d’arriver enfin à notre destination, le restaurant Aquaterra de Pala Mesa. Mais un des journalistes présents, un résident du coin qui connaissait bien l’endroit, nous suggéra d’emprunter une autre route qui traverse la forêt nationale Cleveland. Cette suggestion s’avéra une excellente idée, puisque l’une des routes qui sillonnent la forêt nationale est une voie d’accès au parc de véhicules hors route de la région. Cette route en lacet, de la largeur d’une seule voie, est tout simplement spectaculaire et ne peut être décrite que comme un sentier pavé.

J’ai commencé par suivre la demi-douzaine de motos qui me devançaient, fermant le groupe. Nous nous déplacions à environ 60 km/h principalement en deuxième, puisque certaines portions de la route étaient très abîmées, comportant des changements de dénivellation abrupts, des virages en épingle et du sable par endroits dans les quelques courbes que nous avons croisées. Cette route semble avoir été faite sur mesure pour la STT et l’envie me prit rapidement de vouloir rouler en solo, à mon propre rythme. Je me suis finalement arrêté pour soulager ma vessie (le café vous réveille, mais finit par vous ralentir!), mais aussi pour creuser l’écart entre le groupe et moi. Lorsque je suis remonté en selle, j’ai accentué la cadence, me tenant toujours principalement en deuxième, mais à un régime et à une vitesse beaucoup plus élevés.

Roulant maintenant à 80-90 km/h, le facteur fun atteignait son paroxysme. J’accélérais avec force en sortie de virage, seulement pour freiner intensivement un peu plus loin avant de me lancer à l’assaut du prochain virage. À l’occasion, j’étais surpris par du sable dans le milieu d’une courbe, mais je me contentais alors de maintenir les freins un peu plus longtemps afin de ralentir juste ce qu’il faut pour pouvoir éviter l’obstacle sécuritairement ou rouler par-dessus, tout dépendant de sa grosseur. Dans ces conditions, la STT est totalement grisante à piloter! Faisant osciller la balance à 181 kg, elle est quelque peu difficile à manier dans les virages en épingle presque aussi serrés que des virages en U, mais sinon elle se manœuvre avec une aisance remarquable. La moto se cabre facilement sur sa roue arrière lorsque je synchronise l’ouverture des gaz au passage de crêtes abruptes, un petit jeu que j’ai refait à maintes reprises.

Bien entendu, ma façon de piloter m’a parfois causé quelques ennuis, et j’ai eu un moment de prise de conscience lorsque la moto a quitté le sol en se déportant latéralement alors que je négociais un virage à gauche serré ascendant et comportant un devers prononcé au point de corde… J’ai allongé le pied puis j’ai contre-braqué pour m’aider à retrouver mon équilibre, réussissant à stabiliser la fourche, mais je crois que c’est simplement la chance qui m’a permis de ramener les roues au sol, la moto reprenant sa trajectoire avant que la chaussée ne se défile devant moi. Je n’ai cependant pu m’empêcher de repenser à la présentation technique du matin au cours de laquelle Eric Buell décrivait les avantages de la centralisation des masses sur le contrôle du déportement. Je n’ai plus besoin d’aucune autre démonstration de ce principe et j’ai roulé plus prudemment pendant le reste du trajet…

Le débattement avant et arrière des suspensions, qui sont entièrement ajustables, est de 143 mm, soit 22 mm de moins que celui de la Ulysses, et les suspensions sont réglées pour une conduite légèrement plus ferme. Lesdites suspensions absorbent les nombreuses bosses et sauts sans sécheresse, bien que les occasionnelles excursions à fond de train au passage de bosses plus grosses se fassent ressentir dans les mains. Notre détour nous forçat à emprunter une brève portion de route non pavée qui est reliée à la route originale, et là aussi, la Buell s’est montrée amusante. Cette route est plane, compacte et plus large que le sentier asphalté. Même si les pneus radiaux de série Pirelli Scorpion sont conçus avant tout pour une utilisation sur route, la STT tient bien le cap et maintient une vitesse raisonnable.

Après notre pause du dîner, nous nous en tenions aux routes plus larges et plus rapides à vitesse d’autoroute. La direction est légère et un minimum d’effort est requis pour changer de direction, sans aucun effet sur la tenue de route, et le long empattement de la XB (1 372 mm contre 1 302 mm pour la CityX) est stable et inspire confiance. La conduite sur autoroute est décontractée, le moteur tournant seulement à 3 000 tr/min à 100 km/h. L’un des irritants perceptibles sur la STT est le radiateur situé sous la selle qui s’actionne chaque fois que l’on éteint la moto et qui demeure en fonction pendant plusieurs minutes, malgré des températures avoisinant les 15 C°. Quand quelques-unes des Buell de notre groupe étaient arrêtées, nous devions considérablement élever la voix pour couvrir le bruit des radiateurs vrombissants. C’est un léger défaut, mais, d’un autre côté, ça incite à continuer à rouler!

Nous avons piloté la XB12STT sur différents types de routes, allant des autoroutes interétatiques aux sentiers, et elle s’est très bien comportée sur chacune d’elles. Il ne s’agit en aucun cas d’une monture de hors route et la courte portion de conduite hors route que nous avons faite était sur une surface relativement lisse. Ce modèle s’apparente toutefois à une moto de sentier conçue pour la route qui excelle en milieu urbain, spécialement sur la chaussée abîmée et plus particulièrement sur des routes sinueuses. Quand Eric Buell a conçu cette moto, son principal objectif était d’en faire une monture amusante à piloter et on peut affirmer qu’il a réussi.

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